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Commentaire de Walid Haïdar

sur Clémentine Autain tente de rallier les Alternatifs au Front de Gauche


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Walid Haïdar 7 septembre 2012 02:52
Merci de votre proposition. J’y réfléchirai, mais pour l’instant je n’ai pas le temps de m’investir sérieusement dans quoi que ce soit. Je veux dire, j’ai un peu de temps, mais mon cerveau ne sait pas faire plus de deux choses sérieuses pendant une même période. Peut-être après mi-2013.

Sur la Libye : Mélenchon a dit très clairement à propos de la Syrie, qu’il ne fallait sous aucun prétexte intervenir militairement, et qu’il ne voterait pas une résolution similaire à celle de la Libye parce que "on a vu ce que ça a donné" à savoir que l’OTAN en a profité pour bombarder, ce qui en soit est grave, mais en plus quoi qu’on pense de cette intervention, il est clair que les conséquences sont dramatiques, aucunement meilleures qu’avant. C’est ce qu’il a dit (ne me demandez pas la vidéo mais je crois que c’était dans sa dernière interview chez Bourdin, pas sûr). Malheureusement, il parle surtout d’Amérique latine sur son blog en ce moment.

Mélenchon est anti-impérialiste. Il n’a pas évolué sur ce point, et son engagement avec l’amérique latine contre l’impérialisme US et les dictatures parachutées date de fin 70 début 80 (les vieux résistants chiliens le connaissent et le reconnaissent comme un des leurs car il les a aidé depuis la France). Son engagement contre les guerres du Kossovo, d’Irak (les deux), de Yougoslavie, d’Afghanistan, son de notoriété publique à gauche, et il a d’ailleurs bien ramassé pour ça.

Ceci dit, et comme j’ai tenté brièvement de l’expliquer, j’estime que la gauche radicale (qui n’est pas Mélenchon, mais dont Mélenchon est dépendant, puisqu’il n’est pas un électron libre qui raconte ce qu’il veut) est dans une situation délicate vis à vis de la question impérialiste.

Pour comprendre l’idée par un de ses aspects, sans prétendre démontrer ma thèse, qui prendrait un bouquin entier : 
Le NPA à la base est Trotskiste. Trotskiste ça veut dire férocement anti soviétique : PC et LCR sont historiquement les pires ennemis ! Aujourd’hui le NPA n’est plus tout à fait la LCR, cependant cet héritage a laissé des traces sur la question anti-impérialiste, car c’est un anti-impérialisme bilatéral : anti-capitaliste et anti-soviétique, anti-soviétisme qui prend aujourd’hui la forme d’un anti-autoritarisme impersonnel, qui fait que le moins méchant d’un conflit est toujours le moins autoritaire (en apparence), je caricature là, mais en substance, ça revient un peu à ça. On a donc une tension historique PC/LCR. Couplée à cette tension, la question raciale. La gauche radicale est férocement anti-raciste, par conséquent, elle est baïllonnée d’une certaine façon par la stratégie antisionnisme=antisémitisme des chiens de gardes pro Israëliens, pourquoi, parce que toute cette mouvance de gauche radicale n’est pas uniquement composée de grands intellectuels brillants, au contraire, elle est surtout composée de gens de bonne volonté, vaillants, mais manquant d’une vision forte sur ces questions, que pourrait apporter une grande figure, ou un collectif d’intellectuels particulièrement inspirés et surtout : audibles ! Il n’y a pas cela, car les bons analystes à gauche sont peu entendus (je ne parle pas d’A. Badiou que je ne trouve pas épatant), et surtout ne se portent pas assez sur le terrain géopolitique.

Si on regarde donc, on a d’un côté la tension historique PCF/LCR sur fond d’anti-impérialisme mué en anti-autoritarisme chez les trotskystes, de l’autre le bâillon de l’antisémitisme que vous diriez peut-être résulter de "l’esprit bobo naïf idiot utile".
Or que s’est-il passé au PCF ? Il y a eu dans les années 90 la remise en cause du Stalinisme, puis son reniement pur et simple en dehors de quelques vieux "stals" indécrottables. Et alors qu’est devenu la réflexion anti-impérialiste alors que d’une part la LCR, les trotskystes en général et même l’ensemble de la gauche continuaient à mettre la pression sur le PCF sur son côté autoritaire, que le PCF tournait la page du Stalinisme ? Et bien comme la géopolitique post soviétique oppose l’empire américain (le club des "démocraties") aux méchants barbares autoritaires ou islamistes, personne à gauche n’a pu être audible pour faire une critique radicale de l’impérialisme qui couvre tout le spectre de la question, et tonne dans les moments critiques : par exemple, JLM a bien écrit des papiers, s’est bien opposé au sein du PS, dans son courant propre, dans des bouquins, dans les coloques, dans des articles, dans les revues de gauche : du vent. Le contexte politique a fait que ce type de voix n’ont pas pu porter.

Cette question (cruciale) est donc devenue lettre morte pendant des années, en fait au moins 20 à 30 ans. 20 à 30 ans d’apathie sur la géopolitique mondiale, non qu’il n’y avait plus de réflexion, mais que celle-ci restait lettre morte, ne prenait pas corps dans un mouvement politique, elle restait à la marge à l’intérieur des partis. Et sur cela, vient donc se greffer une nouvelle vague de sympathisants de gauche (de modérée à extrême), qui sont tous frais en géopolitique, et étant profondément anti-racistes (ce que je suis aussi), ils n’ont pas du tout les outils ni l’inclination à critiquer radicalement l’impérialisme américain, et comme de l’autre côté les chiens de garde du système sautent sur tous les dissidents anti-impérialistes pour les traiter de fachos antisémites, que ce système est bien rôdé, efficace et relayé partout, la gauche est désarmée, de la base à une bonne partie des cadres, pour faire mouvement pleinement et sereinement face aux événements, sauf en matière purement économique, ou quand ça concerne la Palestine, où les gros sabots d’Israël font que défendre les opprimés palestiniens coule de source pour tout ce qui est à gauche du PS.

Heureusement, non seulement ça commence à bouger à la base grâce aux vagues d’adhésions depuis la création du PG et au PC lors de la compagne 2012, et le fait qu’il y a tout de même une base anti impérialiste réelle, chez beaucoup de cadres, mais qui comme j’ai tenté de l’expliquer ci-dessus, n’est pas en position de s’exprimer sur la totalité du spectre de cette problématique majeure, et pour l’instant se contente de résister sur le versant économique de l’impérialisme.

J’ai pas été très clair mais c’est un problème complexe qu’il est difficile de résumer en quelques lignes.

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