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Commentaire de Éric Guéguen

sur Éloge des valeurs : Hannah Arendt contre Leo strauss


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Éric Guéguen Éric Guéguen 5 décembre 2012 19:06

@ Machiavel :
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Je vous rassure, je ne crois pas à la naturalité du bien et du mal, je veux dire que c’est bien dans l’état de culture que l’homme prend conscience, à mes yeux, que son intelligence l’enjoint d’opérer cette distinction. L’idée de bien et de mal, chez les animaux autres que l’homme, est totalement absurde.
Cela dit, je ne peux pousser jusqu’à dire que les valeurs ne comportent pas un caractère absolu et que l’éthique serait soumise aux modes, aux traditions ou à l’histoire. Puisque nous avons vocation à parler du réel, prenons un exemple concret :
Vous vous baladez dans la rue quand, tout à coup, la personne devant vous laisse échapper un billet de 50 euros de sa poche. Vous l’avez vu, et êtes le seul à l’avoir remarqué. Que faits-vous ? Quoi que vous décidiez, il est advenu un "désordre", et l’"ordre des choses" vous invite gentiment à y remédier. Autrement dit, le juste en l’occurrence consiste à rattraper la personne et à lui rendre son billet. Si c’est ce que vous faites, vous répondez à une injonction morale et êtes de ce fait vertueux. Peut-être choisirez-vous ne garder le billet, et la justice ne s’y opposera pas, car, "pas vu, pas pris". Quoi qu’il en soit, vous aurez été injuste et immorale. Ce n’est pas une opinion, c’est un fait. Et pas n’importe quel fait : un fait qui découle d’une valeur.
Vous pourriez me dire, j’agis simplement par empathie en rendant son billet à la personne car j’aimerais que l’on fasse la même chose à sa place. Eh bien poussons jusqu’à prendre l’exemple d’une personne sue vous détestez, qui vous a fait virer et qui est parti avec votre femme. Là, l’empathie est difficile, pour le moins. Eh bien le résultat reste le même : si vous décidez de ne pas lui rendre son billet, vous serez immoral et injuste. C’est un absolu. Un absolu qui ne prescrit rien et se contente de décrire les choses dans votre esprit, mais un absolu quand même.
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Pour approfondir ce que je viens de dire, je dirai que la fait que les faits, justement, soient devenus nos seuls vecteurs normatifs est précisément ce que déplore Arendt, Strauss, d’autres encore. Or, dans notre exemple, c’est un jugement moral qui s’actualise forcément, qui se transforme en fait. Les gens qui ne se gouvernent que par les faits, eux, peuvent très bien se passer de toute valeur. D’où la supériorité des valeurs sur les faits, contrairement à ce que prétendent certains trolls sur le net en ce moment (...).
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Enfin, pour parler d’esclavage, le fait qu’il soit contraire à la nature humaine n’a rien à voir avec les Droits de l’Homme (vous ne l’avez pas dis, je sais, c’est une simple précision de ma part), mais touche plutôt au fait qu’en rendent un être esclave, on l’empêche de donner le meilleur de lui-même... donc d’accomplir sa nature !


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