Walid,
J’avoue qu’entre ma première réponse et maintenant, je me suis replongé dans Spinoza, et je dois m’incliner sur un point : OUI, vous avez raison, l’anti-finalisme de Spinoza se limite à la nature, et OUI, il est bien question chez lui, semble-t-il, du summum bonum.
Merci donc de m’avoir bousculé.
Et je vous remercie doublement car, à la lecture du livre de Frédéric Manzini, Spinoza : une lecture d’Aristote, je m’aperçois que mon erreur consiste, contre toute attente, à ne pas voir encore suffisamment les proximités entre Spinoza et Aristote. Le premier doit énormément au second, c’est indéniable et à la lecture de ce livre, certains copié-collés sont même troublants !
Reste une différence de taille. Si l’un et l’autre mettent en avant l’éthique et la politique, ils les font correspondre de manière strictement opposée : alors que pour Aristote l’éthique est un préalable à la politique, pour Spinoza, c’est la politique qui se trouve mise au service de l’éthique. Spinoza, à cet égard, n’est pas du tout opposé aux jugements de valeur, au bien et au mal, mais il n’attribue la faculté de discernement en cette matière qu’aux seuls sages, à ceux qui ont justement accès à la "connaissance de 3e type". Spinoza distingue lui aussi selon la disposition éthique des individus. Mais il est plus attaché, semble-t-il, au devenir individuel que le Stagirite, précisément parce que pour lui c’est le tout politique qui engendre l’auto-gouvernement éthique (individuel), et non l’inverse comme chez son devancier grec. Spinoza est un Moderne qui louche vers les Anciens, c’est ce qui fait sa force et son actualité.
Quant à l’attachement de Spinoza à la démocratie en tant que régime naturel, je suis d’accord là-dessus depuis le début, mis à part que Spinoza s’adresse en même temps, en filigrane, à une classe d’hommes philosophes qui "sortent du lot", et que les mots peu amènes qu’il a pour les femmes sont, curieusement, très peu mis avant...
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Au plaisir de vous lire... si toutefois quelqu’un ici m’écoute encore ! 