Je suis d’accord avec machiavel (et ses correctifs par rapport à ce que j’ai dis sur le fait de "proposer des lois").
Concernant la question des personnes "bonnes" ou "mauvaises", j’aurais
quelques remarques à formuler pour faire avancer les idées (et casser
des idées fausses à ce sujet).
1. Une idée largement répandue est que les humains, "par nature",
seraient portés à la domination (s’ils le peuvent) et à la malveillance
(en général) : "l’homme est un prédateur", "l’homme est un loup pour
l’homme", etc.
2. Cette idée est alimentée par l’observation du comportement humain, et
plus particulièrement l’observation de ses pires penchants, qui
effectivement abondent dans l’Histoire des civilisations.
3. Pourtant, d’importantes recherches scientifiques, d’une part sur le
plan biologique (et plus spécifiquement génétique - voir
l’épigénétique), d’autre part sur le plan sociologique, montre que cette
idée est biaisée (fausse).
4. Ce débat est un vieux débat, portant sur la question de l’inné et de
l’acquis. L’homme est-il "par nature" mauvais, ou développe-t-il des
penchants mauvais à cause de son environnement socioculturel ?
5. Ces recherches évoquées ci-dessus montre de façon déterminante que
l’impact de l’environnement socioculturel est déterminant dans le
comportement des humains en société. Le cadre - bienveillant ou
malveillant - du contexte socioculturel dans lequel les humains évolue
depuis leur enfance déterminera de façon majeure le type de comportement
qu’ils vont adopter, et non une quelconque "nature", prétendument
"inscrite dans ses gènes".
6. Or, le contexte socioculturel n’est pas une fatalité : il résulte de
choix en matière de politiques, de valeurs, de croyances. C’est quelque
chose qui n’est pas figé, qui peut évoluer, et qui dépend aussi de
chacun de nous.
7. Il s’agit donc, dans le cadre de la réflexion présente sur
l’élaboration d’une constitution et d’institutions robustes destinées à
protéger les citoyens contre tous les abus de pouvoir, de comprendre
quelles sont les causes majeures, fondamentales "la cause des causes" de
leurs attitudes négatives (domination, corruption, criminalité,
perversion, etc.).
8. La cause fondamentale des comportements "déviants" que nous observons
me semble être la nature de notre approche économique : l’économie
fondée sur la monnaie. Il me faudrait donc, pour démontrer cette
affirmation, développer cela, en étant aussi bref que possible.
A. La
monnaie est un instrument inventé par les humains pour échanger des
marchandises et des services.
Au moment où la monnaie a été inventée, elle a sans doute répondu à un besoin
dans la façon dont les hommes voulaient s’organiser, et a donc sans doute rendu
service pendant un temps déterminé. Le monde actuel, globalisé, avec la
quantité de connaissances et de découvertes acquises depuis des générations, a
changé, et ce système ne remplit plus la fonction pour laquelle il a été
inventé : il est donc obsolète.
B. La monnaie, qu’elle soit matérielle (billets,
pièces, or, etc.) ou virtuelle (données informatiques) n’a en elle-même aucune
valeur réelle : on ne peut pas se nourrir avec des billets, ni produire de
l’énergie, ni fabriquer une maison ou quoi que ce soit ; ce n’est pas la monnaie qui produit des richesses, ce sont les ressources qui constituent la
véritable richesse.
C. La
valeur que l’on attribue à la monnaie est subjective et dépend de la confiance qu’on accorde à ces
signes (nb. voir aussi le point 7 à ce sujet), mais également de la quantité de
signes en circulation (inflation / déflation).
D. Par contre, la valeur des biens et des services va dépendre essentiellement de leur
rareté : un produit, un bien ou un service abondant aura un faible prix ;
un produit, un service ou une ressource quelconque se trouvant en faible
quantité ou en pénurie aura un prix élevé (principe de la "loi de l’offre
et de la demande").
E. Par conséquent, l’ensemble du système économique basé
sur la monnaie est fondé sur la (gestion de la) pénurie : pour qu’un
produit, une ressource ou un service ait une valeur, il doit être plus ou moins
rare. Le suprême paradoxe étant que, pour maintenir sa valeur, la monnaie
elle-même doit être rare !
F. Comme la quantité de signes (de monnaie) en
circulation doit elle-même être en situation de pénurie, il en résulte que de
manière générale, il doit ne
jamais y en avoir assez pour tout le monde ... !
G. Ce
système d’économie basée sur la monnaie doit reposer sur un ensemble de lois contraignantes, sans lesquelles l’ensemble
des populations ne joueraient pas le jeu. Ces lois sont le ciment du système et ne peuvent être discutées, à la
façon d’un credo religieux au sein d’une église.
H. Comme
l’argent devient nécessaire pour se procurer les produits et les services nécessaires
à vivre et prospérer, et comme il n’y en a pas assez pour tout le monde, il
s’ensuit logiquement qu’il va y avoir concurrence et compétition.
I. De façon générale, l’ensemble des ressources (donc des richesses de la planète) vont
aboutir entre les mains d’un très, très petit nombre de personnes (en
proportion au 7 milliards d’individus), et ces personnes, contrôlant de (très) grandes
portions des ressources, déterminent elles-mêmes la rareté et les prix, quitte
à détruire (ou dissimuler) les ressources excédentaires (il faut maintenir
artificiellement ! - les prix, donc la rareté et la pénurie).
Donc, tout système économique basé sur la monnaie revient in fine à organiser et pérenniser la pénurie et la compétition,
plutôt que gérer de façon commune les ressources dans le but de générer
l’abondance pour tous.
Si pareille analyse nous
choque, nous pourrions déjà nous demander si cela correspond à la réalité
observable ou non. A la lumière de cette analyse, il semble bien que - au delà
d’un mauvais système de gouvernement qui rend les peuples structurellement
impuissants - critique très pertinente et éminemment nécessaire - ce soit le
principe même de l’économie basée sur la monnaie que nous devrions balayer de
nos conceptions, afin de repenser un système entièrement neuf.
On peut réfléchir à toutes
les implications et conséquences sur les comportements humains d’une société
sans monnaie, sans argent, et où chacun à accès à tous les biens ou services
dont il a besoin. Mais pour juger du caractère utopique ou réaliste du projet, il nous faut
envisager les choses en dehors du carcan étroit des conditions actuelles, sans
quoi nous condamnerions la proposition sur des arguments fondés sur les
conditionnements mêmes que l’on cherche à changer, ce qui serait le comble de
l’absurde. Nous sommes
névrosés par le contexte de la société actuelle : nous sommes matérialiste parce
qu’il n’y en a pas assez ; nous amassons et nous devenons possessifs avec
les biens matériels, parce que cela représente des richesses, nus
développons l’avidité parce que la possession est le signe de la réussite.
Il en irait tout autrement dans un contexte où tous auraient accès à tout ce
dont ils ont besoin librement. Dans pareil contexte, les névroses possessives
disparaissent. Le besoin d’accumuler (peur du manque) n’a plus
besoin d’être. L’obsolescence planifiée disparait, et les ingénieurs peuvent -
enfin ! - déployer toute leur créativité afin de développer des dispositifs et
appareils solides, fiables et durables (puisqu’il n’y a plus
besoin de répondre à des objectifs de rentabilité et de consommation
renouvelée). Les vols n’ont plus lieu d’être, par
conséquent, toute une série de crimes n’ont plus de raison de se développer.
Libéré des tâches pénibles et dangereuses grâce à la robotique, les gens
peuvent consacrer une grande partie du temps ainsi libéré afin de se consacrer,
qui à la gestion de la cité, qui a l’étude, qui à des loisirs (créatifs ou
non), qui à des associations culturelles, qui à la spiritualité, qui à la
recherche... La participation à la gestion
de la cité est encouragée et souhaitée, par le biais de l’application des
principes de l’Open Source à tous les domaines
de la politique (au sens noble du termes, c’est-à-dire "gestion de
la cité") : une véritable démocratie participative.
(désolé pour la longueur de mon intervention).