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Éric Guéguen (---.---.136.145) 6 décembre 2012 13:03
Éric Guéguen

@ Niza :
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Bonjour Niza et merci d’intervenir en connaisseur.
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Je vais tout de suite vous décevoir : j’ai vu la vidéo BBC en question il y a environ 3 ans et serais bien incapable de l’analyser pour vous. Je me souviens en effet qu’il y était question de Strauss, du 11 septembre aussi si mes souvenirs sont bons. N’était-ce pas dans celle-ci qu’il était aussi question d’une récupération de Strauss en Iran ? Parce que j’avais vu ça également quelque part, preuve que chacun peut trouver à boire et à manger dans la prose straussienne !
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Mais je vais vous dire en quoi l’assimilation des néocons’ et de leur politique étrangère à une application des points de vue de Strauss me paraît tout à fait erronée, ce malgré ce que vous avez pu ajouter sur la question.
Le cœur de la critique qu’adresse Leo Strauss à la modernité se trouve dans Droit naturel et histoire, où il est dit qu’à l’ancienne prérogative du devoir dans la philosophie politique antique a succédé celle du droit dans la science politique moderne. Ceci est capital car désormais l’homme n’est plus l’élément d’une communauté qui mérite ses droits à l’aune du respect de ses devoirs mais l’inverse : c’est la société qui se doit de garantir les droits de l’individu avant que de lui imposer des devoirs (sinon, il y a rupture de contrat). Et c’est là qu’apparaît aussi la critique de Strauss portant sur les philosophies de Machiavel et de Hobbes, qui abaissent tous les êtres humains (pour faire vite, trop vite peut-être) à leur seule animalité (estomacs sur pattes attachés uniquement à leur conservation). Et tout ceci prête inévitablement le flanc à beaucoup de choses : je vous laisse imaginer ce qu’une civilisation peut faire, peut devenir - en bien comme en mal - une fois qu’elle a fait de l’intérêt des individus une fin unique et ultime, et de la recherche effrénée du confort un principe d’action politique. Nous en ressentons précisément les désagréments aujourd’hui... et c’est là que je dis que Strauss est très puissant,et beaucoup plus profond à mes yeux qu’Arendt.
Or, une fois que l’on a dit ça, quel rapport trouver entre cette critique straussienne et le fait que les USA soient un empire utilitariste au possible, enfermé dans une boulimie de confort, de production de gadgets en tous genres et enclins, par surcroît à rendre le monde entier à leur image ??? RIEN.
Peut-être que Strauss, en revanche, aurait été patriote (je sais que son film préféré était Zoulou...). Mais comme tous les Juifs expatriés en Amérique, peu ou prou (à l’exception de Chomsky ?...). Peut-on leur jeter la pierre de savoir gré à ce pays de les avoir accueillis dans l’entre-deux guerres ?
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Autre chose : on dit souvent que Huntington et Fukuyama furent des disciples de Strauss. D’abord c’est assez étrange car ils n’ont rien à voir ensemble. De plus, si vous avez lu Huntington et son fameux Choc des civilisations (encore un livre honni par la presse française sans même l’avoir lu), vous savez qu’il était à cent lieues de prôner l’hégémonisme américain, bien au contraire.
Donc beaucoup de sottises sont dites un peu partout il me semble...
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Sur ce, bon appétit.
Éric G.




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